Encore au stade de l’expérimentation, le covoiturage dynamique pourrait bien devenir le moyen de transport de demain. Les français semblent de plus en plus enclins à partager leur voiture, et les nouvelles technologies de l’information s’apprêtent à révolutionner ce service. Reste à savoir si l’offre sera capable de se structurer.
« L’outil de déplacement du futur, le voici. » Joignant le geste à la parole, Patrick Coroller pose son smart-phone sur la table. Pour le chef du département transport de l’Ademe, la technologie GSM est en passe de devenir « l’assistant personnel de mobilité » de demain. « Les smart-phones nous communiqueront instantanément une multitude de données pour organiser nos déplacements : disponibilité des moyens de transports en libre service, optimisation de la consommation de CO2, prix du transport, passages des transports en commun à proximité du lieu de départ… Nous sauront si des amis et collègues s’apprêtent à croiser notre trajet.»
L’engouement peut faire sourire, mais la tendance se confirme. Le marché de la mobilité glisse progressivement vers une offre de services. Et la voiture jusqu’ici érigée en symbole de la réussite sociale tend à devenir un objet purement fonctionnel. Le dernier baromètre Macif de la mobilité durable l’atteste : 79% des français se disent prêts à pratiquer le covoiturage. Pour autant, seuls 3 à 4% d’entre eux le franchissent réellement le pas. Plébiscités par les entreprises dans le cadre de leurs plans de déplacement, ce mode de transport alternatif nécessite la création d’un réseau (souvent une plateforme Internet), une communication et une organisation efficaces entre conducteurs et passagers, et un accord tacite sur le paiement du transport. Autant de freins à la démocratisation du covoiturage.
D’où l’intérêt, pour les opérateurs du secteur, du recours au smart-phone. Le « covoiturage dynamique » repose en effet sur un échange de données en temps réel, entre les conducteurs et passagers potentiels, via leur téléphone. Les intéressés souscrivent un abonnement auprès d’un opérateur qui les prévient instantanément des positions et trajets de chacun, et qui leur propose un compte électronique à créditer ou débiter selon qu’ils conduisent où se font conduire.
Des expérimentations prometteuses
Plusieurs expérimentations ont vu le jour. En Hollande, pour les salariés de l’aéroport d’Amsterdam, en Allemagne, pour ceux de l’aéroport de Francfort, pour les habitants de la baie de San Francisco, ou encore en Suisse. Toutes présentent quelques faiblesses, mais témoignent d’un intérêt grandissant pour le « covoiturage 2.0 » Preuve en est, l’opérateur téléphonique Nokia estime à 500 milliard de dollars le marché potentiel du covoiturage dynamique mondial.
En France, Covivo est la première start-up à proposer ce type de service. Avec le support des collectivités locales, l’opérateur a lancé deux opérations d’expérimentation, en Isère et en Lorraine.
Un secteur à soutenir
Si Matthieu Jacquot, directeur associé de Covivo, salue les partenariats noués avec les collectivités locales, il regrette néanmoins l’absence d’organisation, au niveau national, d’un réseau de covoiturage performant. « Les technologies GPS et GSM sont un atout considérable pour déployer la pratique du covoiturage en France, mais l’organisation doit suivre. Il existe des régions où trois systèmes de covoiturage classique cohabitent déjà, ce qui est contre-productif. Il faut créer une politique de l’offre et structurer le secteur. » Le Certu * souligne également la pertinence des partenariats publics-privés, dans son rapport « Covoiturage dynamique, étude préalable avant expérimentation », paru début 2009. « Les partenariats entre opérateurs du covoiturage et ceux des transports publics rentrent dans une logique d’intermodalité. (…) La création d’une structure qui centraliserait toutes les annonces permettrait à l’utilisateur de trouver un covoitureur sans être obligé de s’inscrire sur plusieurs sites. Cette inter-opérabilité ne peut être opérationnelle qu’avec le soutien et l’engagement de divers acteur, tels que les collectivités, les autorités organisatrices et les différentes structure proposant un service de covoiturage. »
L’entreprise : l’avenir du covoiturage dynamique ?
D’après le rapport du Certu « en terme de place de marché, ces sont les larges bassins de vie ou les zones localisées génératrices de déplacement qui sont les lieux les plus propices à la mise en place d’un covoiturage dynamique. Il est nécessaire de prendre en compte ce facteur et de l’intégrer dans le cadre des Plans de Déplacements Entreprises (PDE). » Un constat partagé par Jacques Crespy, Directeur des investissements à l’Institut Gustave Roussy, et « leader » en matière de PDE, qui se dit très intéressés par ce service. « Gérer la mobilité des salariés est devenu une compétence à part entière dans l’entreprise. Or, le covoiturage dynamique répond aux besoinx de flexibilité des salariés. L’existence de telles offres est donc une très bonne nouvelle. »
*Centre d’Études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques
Source : Novethic