Le covoiturage dynamique est une forme de partage automobile qui met en relation passagers et conducteurs en temps réel. Il s’organise grâce à des plateformes numériques, qui géolocalisent les demandes et offres de voitures, connectent les covoitureurs, les guident et facilitent la transaction. Depuis plusieurs années, des start-up s’essayent à construire ce marché, penchant d’un côté vers le covoiturage régulier domicile-travail et de l’autre vers du « taxi » entre particuliers.
Aujourd’hui de nouvelles offres (Tooxme, GreenMonkeys par MOPeasy, Carma …) franchissent le cap de l’expérimentation et cherchent à augmenter la masse critique nécessaire pour que le covoiturage dynamique fonctionne.
Nous avons interrogé Matthieu Jacquot, directeur de Covivo, sur son application de « mobilité collaborative » Tooxme. Lancée il y a un an, la plateforme permet de réaliser en moyenne entre 25 et 30 courses quotidiennes à Lausanne. L’offre devrait bientôt être étendue à Zurich et Genève. Elle s’adresse à une clientèle urbaine et connectée, en quête d’une alternative aux taxis, pour des trajets de 3 à 100 Km.
Comment fonctionne Tooxme et en quoi diffère-t-il de vos expérimentations précédentes ?
Tooxme est une application mobile de covoiturage en temps réel qui permet de mettre en relation conducteurs et passagers sur un même trajet. Les passagers peuvent repérer les conducteurs autour d’eux et les solliciter pour partager un trajet avec eux.
Dans nos précédentes expériences de covoiturage en temps réel, qui se basaient sur des techniques développées dans les années 1980, on a fait l’erreur de proposer des solutions servicielles techniques sans se focaliser suffisamment sur la notion de communauté. Or, il ne faut pas présupposer la demande, surtout pour un système qui requiert une masse critique d’utilisateurs pour fonctionner. On se retrouvait donc avec trop de conducteurs par rapport aux passagers volontaires. Avec Tooxme, on tente justement de renforcer l’aspect communautaire et
d’inverser la tendance.
Comment se construit une communauté avec des liens de confiance dans le covoiturage dynamique ?
Tooxme fonctionne complètement sur la logique du réseau social. On organise des soirées pour que les conducteurs se rencontrent autour d’un verre. Sur la confiance, on demande des garanties aux conducteurs : une photo de leur voiture, une photocopie de leur carte d’identité … Ce qui compense, du coup, l’absence de contact téléphonique préalable entre conducteurs et passagers. Enfin, les conducteurs sont évalués par les passagers.
Tooxme s’adresse principalement à des trajets occasionnels : rendez-vous professionnels, de santé, retour de soirée, etc. Sur les trajets domicile-travail, il est beaucoup plus difficile de susciter la confiance. Les expériences que nous avons menées avec la région Rhône-Alpes ont montré par exemple que la crainte de ne pas disposer de trajet retour inhibait fortement les potentiels passagers.
Comment inciter les usagers à franchir le pas et à s’inscrire sur une nouvelle plateforme ?
La question des incitations est essentielle pour convaincre le conducteur de s’inscrire à la plateforme et arriver à une masse critique. Qu’est ce qui va faire que le conducteur aura envie de se connecter à Tooxme ? Nous avons joué sur le marketing et proposé que les conducteurs soient rémunérés à hauteur de 40 à 50 centimes de francs suisses par kilomètre*. L’idée n’est pas qu’il fasse du bénéfice, mais plutôt qu’il amortisse ses frais.
Parallèlement, nous avons mis en place un dispositif de conducteurs premiums : mieux rémunérés, ils s’engagent à être disponibles et viennent combler le manque éventuel de conducteurs disponibles. Grâce à cette offre complémentaire qui se rapproche un peu d’un service de chauffeurs, on résout une partie du problème de la masse critique d’utilisateurs.
*Entre 30 et 40 centimes d’euros.